[Vitrine du Cameroun] – Les réalisateurs camerounais de la nouvelle génération ayant une fibre cinématographique sont rares. Joseph Akama, avec son tout premier long métrage KANKAN, démontre clairement qu’il y a une lueur d’espoir à l’horizon.
L’écriture de KANKAN est considérable et assez solide. En bref, ne soyons pas dur, le garçon a bien écrit son film. Le petit Akama nous emmène vivre une vie. J’ai vécu une vie, celle de Kankan et non une histoire filmique racontée, et c’est à ce niveau que réside la magie du style d’Akama. J’espère que ce sont les jalons d’une démarche assumée et revendiquée.
DG (Kofane) était majestueux dans son jeu, il a une vraie gueule de cinéma. C’est un acteur qu’il faut suivre de près. À le voir jouer, il a du potentiel, mais a besoin d’un maitre réalisateur pour l’emener à réaliser le potentiel qu’il a dans les tripes. Pour l’avoir vu jouer dans deux ou trois films, KOFANE m’a définitivement convaincu dans le film KANKAN et est l’un de mes deux jeunes acteurs camerounais avec ANURIN qui dégagent une aura dominante à l’écran. Le cinéma n’est pas une question de gesticulation mais de présence, d’énergie. Et ce truc, il l’a.
Le jeu de KANKAN (Landry Nguetsa) était également magistral, le connaissant depuis de nombreuses années, je savais qu’il était un metteur-en-scène doué mais je ne l’avais jamais véritablement projeté dans la peau d’un acteur de cinéma. Dans KANKAN, il m’a montré le contraire : le gars est talentueux dans le genre, il n’a laissé personne indifférente. Est-ce parce qu’il vient du théâtre ? Ma crainte demeure, si on le sort de ce jeu caricatural, prononcé et exagéré de Kankan, serait-il capable de faire face à un vrai rôle de cinéma, noble, calme, froid et naturel ?
Je pense que s’il m’a surpris une fois, il pourrait bien le faire la deuxième fois. Cela revient à dire que le film de Joseph Akama est un film de cinéma à la coloration théâtrale. Il s’agit certainement d’une démarche délibérée et volontaire.
Mais je n’ai pas compris pourquoi le réalisateur n’a pas su faire la différence entre KANKAN le personnage sur scène et Dieudonné Afane la personne dans la vraie vie. C’est ce manquement qui, à mon avis, pousse le film dans le jeu théâtral. Dieudonné Afané que l’on retrouve à la maison avec sa femme et son fils avec la même grimace, le même comportement et le même grain de voix que KANKAN sur scène, fait un peu mal au ventre.
Dans ce film, le réalisateur a dû faire face à la nette différence entre KANKAN sur scène et Afane Dieudonné dans la vie réelle. On peut arguer qu’il joue sa vie sur scène, mais il manque une séparation claire. Je suis sûr que l’on me dira comme il en coutume que c’est le choix du Réalisateur. Mais je me dois d’abord de dire ce que je pense. Et parce que nous avons voulu transporter la vie des planches sur terre, nous avons péché sur le réalisme qui devrait être au centre de la vie d’AFANE. La moustache et la barbe Dieudonné Afane sont naturelles à nos yeux.
Mais tous les hommes (Arnaud Ndong, Eric Ebodé, Claye Edou, etc.) autour de lui ont fait des moustaches artificielles grossières qui sont très frappantes à l’œil et font mal au ventre. À ce niveau le maquillage et le jeu des acteurs nous rappellent le théâtre (à l’exception de KOFANE et du BLANC). On peut comprendre donc pourquoi je dis que c’est bien un film de cinéma, mais théâtralisé. Cela pourrait justifier les limites de l’équipe de maquilleurs ou un choix artistique du réalisateur qui n’engage que lui.
Le choix du format 4/3 à l’heure où le 16/9 et ses dérivés sont en vogue est sans doute délibéré. Il reflète l’époque et le temps de Dieudonné Afané: ce que j’ai apprécié. Mais l’étalonnage des couleurs commandé par le réalisateur m’a laissé sur ma faim. L’ambiance ou la colorimétrie des images ne reflétaient malheureusement pas une époque passée qui correspond à l’idée du format 4/3 défendu. Je peux aussi avoir mal aux yeux, on ne sait jamais.
En regardant le film, il va de soi que le réalisateur a fait des recherches incontestables sur la personne d’Afane Dieudonné ou le personnage de KANKAN. C’est aussi ça la démarche des vrais réalisateurs, le cinéma n’est pas un jeu.
KANKAN est un beau film, l’un des meilleurs que j’ai vu ces dernières années par un jeune cinéaste camerounais, il est bien écrit et vous tient assis sur votre siège du début à la fin à travers sa comédie de gestes, de caractères et de mots. Je recommande vivement Kankan aux cinéphiles, croyez-moi, vous ne serez pas déçus. Les projections commencent dès aujourd’hui.
Le jeune Joseph Akama, je l’ai connu d’abord en Arts du spectacle et cinématographie à l’Université de Yaoundé 1 où très vite à la fin de la première année, il avait pris la poudre d’escampette.
Puis je l’ai retrouvé à 10 jours pour 1 film en tant que Coach où avec l’aide des Écrans noirs et du Goethe-Institut, il a eu l’opportunité de réaliser son premier film (Western), puis son deuxième (Into the Den). KANKAN est son troisième film et son premier long métrage.
Beaucoup de succès pour la suite de ta carrière garçon !
Un clin d’œil à Claye Edou Producteur du film.
Par Yadia Mor-Jougan
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