
[Vitrine du Cameroun] – Le 29 novembre 2025, la Fédération camerounaise de Football (Fecafoot), devrait tenir son Assemblée générale élective. Sous couvert de « mesure conservatoire », le ministre des Sports, Narcisse Mouelle Kombi a adressé une lettre à son collègue de l’Administration territoriale Paul Atanga Nji à travers laquelle, il réclame l’interdiction pure et simple de toute assemblée élective dans le football camerounais.
Dans le but de suspendre l’Assemblée générale élective de la Fecafoot, prévue le 29 novembre 2025, Narcisse Mouelle Kombi a saisi Paul Atanga Nji. Le ton de la correspondance est sans équivoque : autoritaire, prescriptif, et surtout interventionniste. Narcisse Mouelle Kombi invoque des « menaces à l’ordre public », des « irrégularités » et des « violations statutaires » pour justifier son action. Pourtant, cette posture interroge. Depuis quand un ministre intervient-il directement dans le processus électoral d’une fédération sportive censée jouir d’une autonomie garantie par les statuts de la FIFA ? La ligne est mince entre régulation légitime et ingérence politique déguisée.
« Le Président de la Fecafoot a continué ce processus manifestement irrégulier, dans une attitude de défiance envers l’autorité de l’État », écrit le Minsep. Cette phrase résume toute l’ambiguïté du discours ministériel. En qualifiant la poursuite du processus électoral de « défiance », le Minsep place l’État en position de juge et partie. Or, la loi de 2018 sur l’organisation des activités sportives accorde certes un pouvoir de contrôle à la tutelle, mais ce contrôle doit-il aller jusqu’à suspendre un scrutin prévu de longue date ?
Le Minsep justifie son intervention par la multiplication des contestations : création d’une « Association Camerounaise de Football » dissidente, processus électoral parallèle lancé par le sénateur Albert Mbida, plaintes du Collectif des Acteurs du Football. Autant de signaux d’une crise profonde. Mais ces divisions ne sont-elles pas aussi le symptôme d’un football camerounais structurellement fragmenté, où les luttes de pouvoir transcendent les clivages sportifs ?
En invoquant « le contexte post-électoral sensible » et les appels présidentiels à l’unité, le ministre instrumentalise la politique pour légitimer son action. Pourtant, suspendre une élection au nom de la cohésion nationale revient à infantiliser les acteurs du football et à nier leur capacité à régler leurs différends en interne. Pire encore, cette intervention risque d’attirer les foudres de la FIFA, qui sanctionne régulièrement les ingérences gouvernementales par des suspensions. En voulant préserver l’ordre public sportif, le Minsep pourrait précipiter le football camerounais dans une crise institutionnelle encore plus grave, avec des répercussions internationales imprévisibles.
Rappelons que le conflit entre Samuel Eto’o, président de la Fecafoot, et Narcisse Mouelle Kombi n’est pas nouveau. Depuis l’élection de l’ancien international camerounais à la tête de cette instance en décembre 2021, les tensions n’ont cessé de s’accumuler. D’un côté, une légende du football mondial qui revendique l’indépendance de sa fédération. De l’autre, un ministre qui brandissait déjà en 2023 la menace d’un retrait d’agrément pour non-respect des directives gouvernementales.








