Thierry Michel Atangana
[Vitrine du Cameroun] – Douze ans après la libération de Michel Thierry Atangana, ex-prisonnier d’opinion reconnu par les Nations unies, l’affaire demeure un abcès de fixation diplomatique, économique et humain. Aujourd’hui encore, aucune issue concrète n’a été trouvée au contentieux qui oppose le Cameroun à l’homme d’affaires, malgré de nombreuses enquêtes menées tant par les autorités camerounaises que françaises.
Le dossier cristallise un blocage à plusieurs niveaux, révélant l’impuissance de la France à protéger ses ressortissants dans des situations de séquestration et de violations graves des droits humains. Le cas Atangana s’est transformé en un symbole d’inertie judiciaire et diplomatique. Officiellement reconnu comme victime de détention arbitraire, l’ancien collaborateur d’un comité de pilotage public-privé n’a jamais été indemnisé. Pire encore, le Cameroun n’a jamais formellement reconnu sa dette envers lui, malgré les conclusions concordantes de plusieurs rapports, y compris ceux d’une enquête interne de la DGSN camerounaise.
Ce silence prolongé ébranle les consciences. Dans les cercles diplomatiques, on parle d’un malaise, d’un non-dit devenu insoutenable. L’unique raison de l’arrestation d’Atangana, soulignent ses proches et ses avocats, serait liée à l’accaparement illégal des fonds destinés au projet dont il avait la gestion. Des fonds que ses partenaires, sociétés françaises notamment, n’ont jamais récupérés, et pour lesquels une reconnaissance de dette aurait permis de sortir de l’impasse. Aujourd’hui encore, la France n’exige du Cameroun qu’une lettre d’intention afin de faciliter la mobilisation des fonds. En vain.
Les deux avocats suisses de Michel Thierry Atangana, Me Mauro POGGIA, Me Najwa EL HAÏTÉ, très actifs sur le plan international, ont saisi de leur côté plusieurs institutions financières, dont le FMI et des organismes américains. Ils alertent sur le risque d’un isolement progressif du Cameroun face à ses partenaires multilatéraux. Ce risque est d’autant plus réel que des pays comme le Canada, la Suisse, l’Angleterre et surtout les États-Unis ont manifesté une solidarité discrète mais constante autour de ce dossier.
Les Américains suivent désormais ce contentieux de très près. D’après les avocats, des démarches sont en cours pour organiser une rencontre officielle avec l’ambassadeur des États-Unis au Cameroun. L’objectif : placer ce dossier sur la table des discussions stratégiques, notamment dans le contexte de la bonne gouvernance et de la conditionnalité de l’aide.
En douze ans, faute d’un geste politique, la dette due à Michel Thierry Atangana a doublé sous l’effet des intérêts. Pourtant, toutes les enquêtes menées par les parties concernées convergent vers un même constat : une injustice criante, un passif à solder, une urgence qui dépasse les clivages nationaux.
L’affaire Atangana est donc bien plus qu’un contentieux individuel : elle est le révélateur d’un système à bout de souffle, où ni les enquêtes officielles, ni les pressions diplomatiques, ni la mobilisation internationale n’ont permis jusqu’ici de débloquer la situation. Chaque jour de silence aggrave le passif, fragilise l’image du Cameroun et alimente une inquiétude grandissante chez ses partenaires extérieurs.







