[Vitrine du Cameroun] – Du 15 au 19 juillet 2024, l’Ong internationale Rainforest Alliance a réuni 31 personnes issues des organisations de la société civile (OSC) et coopératives à la commune de Bana dans le département du Haut-Nkam, région de l’Ouest, sur la vulgarisation des techniques de collecte des données, de réalisation des cartes participatives et des cartes des unités agricoles, selon les exigences 5.8.2 du standard de Rainforest Alliance en agriculture durable.
L’objectif principal de ce cadre de réflexion était de former les membres des OSC, les stagiaires et les coopératives bénéficiaires du projet « Éliminer les obstacles à la conservation de la biodiversité, à la restauration des terres et à la gestion durable des forêts par l’intermédiaire du COmmunity-BAsed LAndscape Management_COBALAM », sur les techniques de collecte des données et de réalisation des cartes participatives.
Concrètement, l’exercice visait à : présenter aux participants la méthodologie unifiée de cartographie participative au Cameroun et les exigences de Rainforest Alliance relatives à la collecte des données de géolocalisation; les former aux techniques de réalisation d’une carte mentale et numérique participative; les former aux techniques d’utilisation d’un récepteur GPS pour la collecte des données géographiques et les former aux techniques de conception des formulaires d’enquête pour la collecte et l’analyse des données via les applications mobiles.
L’activité financée par le Fonds pour l’Environnement Mondial (GEF en anglais) est mise en œuvre par Rainforest Alliance en partenariat avec le ministère camerounais de l’Environnement, de la Protection de la Nature et du Développement durable (MINEPDED) et ONU-Environnement.
La motivation de l’atelier trouve son fondement dans la volonté de l’Ong internationale Rainforest Alliance d’accompagner les groupes cibles bénéficiaires du projet COBALAM qui mènent les activités dans les paysages des monts Bamboutos et Bana-Bangangté-Bangou, afin d’améliorer les pratiques agricoles et mitiger les conséquences environnementales sur ces paysages. Ce d’autant plus que les deux paysages au sein desquels les producteurs exercent leurs activités agricoles constituent des espaces multi-usages : réserves forestières, plantations agricoles et agro-industrielles, zones de pâturages, sources d’eaux, forets sacrées etc.
Dans le cadre de cette formation, Rainforest Alliance a voulu se focaliser sur les forêts sacrées qui, malgré le fait qu’elles constituent des sanctuaires de sauvegarde de la biodiversité végétale et animale et des alternatives à explorer pour la protection de l’environnement, voient leurs superficies faire l’objet d’un « grignotage » progressif. Les principales menaces qui reviennent sont notamment la recrudescence des pressions anthropiques pour les terres agricoles et la collecte du bois de chauffage.
La cartographie participative met à contribution des outils numériques libres et facilement accessibles
Face aux défis qui pèsent sur ces espaces cultuels et culturels dont l’accès était jusqu’à présent réservé aux seuls initiés, les chefs traditionnels et les gestionnaires des forêts sacrées ciblées ont pris des résolutions en novembre 2021, pour améliorer la conservation des forêts sacrées. C’est dans cette logique que la délimitation participative des espaces réservés aux forêts sacrées a été identifiée comme initiative efficace de restauration. « La cartographie participative est un outil qui permet d’intégrer les populations locales au moyen des facilités endogènes, d’élaborer une carte qui permet de résoudre un problème. Il y a eu des cas où l’on constate qu’une aire protégée est chevauchée par une exploitation forestière ou minière. Il y a aussi l’espace communautaire qui est chevauché par une exploitation forestière. Ce sont des situations assez complexes », décrit Rodrigue Nodem, responsable systèmes d’information géographique à Rainforest Alliance, région Afrique. « Au moyen de la cartographie participative, les OSC peuvent aider les populations locales à matérialiser exactement leurs espaces et montrer les endroits les endroits chevauchés par l’UFA. Il y a eu des cas où les OSC ont utilisé des cartes pour faire des plaidoyers auprès de l’Etat et les limites de l’UFA ont été reculées au profit de la population locale », poursuit l’expert.
Les principales applications mobiles vulgarisées à Bana étaient Kobo-Collect (téléchargeable sur Playstore et préalablement installée dans les smartphones pour la collecte des données, Kobotoolbox pour visualiser et traiter les données collectées par les enquêteurs et QGIS 3.36.2 pour importer, traiter, convertir en fichiers Shapefiles et superposer aux cartes de base les coordonnées géographiques collectées par GPS. « Ce sont des outils libres et facilement accessibles. Les OSC ont souvent des challenges et des problèmes d’éthique concernant la licence des logiciels. SPC est payant et parfois la licence coût très cher. Alors, l’alternative c’est Kobo-Collect qui est disponible et peut, dans une certaine mesure, faire le même travail que SPC. On peut faire des analyses descriptives, on peut ramener l’information dans Excel pour faire d’autres analyses qui impliquent la corrélation. Aussi, QGIS est très utilisé et libre », indique M. Nodem.
Des outils fondamentaux pour les plaidoyers et la définition des projets prioritaires de développement
Au terme de la formation de Bana, les leaders des OSC ont exprimé leur satisfaction d’avoir flirté avec de nouveaux outils numériques et ont dit être capables de collecter les informations de façon indépendante, de réaliser leurs cartes ou d’envoyer l’information nécessaire à Rainforest Alliance, pour enrichir les livrables du projet COBALAM. « Cette formation arrive à point nommé, puisque nous sommes sur le terrain depuis des années. Nous avons même déjà eu à réaliser certaines cartes, mais la méthodologie présentée lors de cette formation vient encore booster notre façon de faire. Les outils qui nous sont présentés sont beaucoup plus actuels, smart, fiables et flexibles. Ils vont nous permettre de collecter des données que ce soit à distance ou sur site », confie Dr. Josiane Feugue Kenfack, directeur exécutif du Centre pour l’environnement, le partenariat et le développement local (CEPDEL), par ailleurs coordonnatrice d’un projet de gestion durable des ressources naturelles financé depuis 2021 par Rainforest Alliance dans le cadre du COBALAM. En perspective, elle entend capitaliser cette formation. « Dans nos prochaines activités, nous allons davantage intégrer les outils comme Kobotoolbox pour la collecte des données, car nous aurons à faire des enquêtes auprès des populations, à cartographier les points d’eau sur lesquels nous allons travailler », ajoute-t-elle.
Sans oublier leur importance dans la planification et l’aménagement du territoire. « En ce qui concerne la durabilité, ces outils sont la bienvenue, en ce qu’ils permettent d’abord de localiser de manière spatiale et spécifique les éléments sur le terrain. Ils permettent également de planifier des activités ou des actions à long terme, afin de maîtriser l’espace et de savoir comment gérer de manière raisonnable et durable cet espace », martèle Dr. Feugue Kenfack.
Alors que le Réseau des compétences sans frontières (RECOSAF) est en train d’implémenter un projet financé par Rainforest Alliance dans les chefferies Bameka et Bamougoum, son secrétaire exécutif, Emmanuel Tchassa, revient sur le renforcement de capacités basé surtout sur la cartographie participative dont il a été bénéficiaire. « Nous sommes outillés pour qu’à la fin de notre projet, nous poussions élaborer des cartes qui sont partie des travaux de restauration des forêts sacrées pour lesquelles nous sommes en train de travailler. La formation est capitale non seulement pour le projet que nous sommes en train d’initier, mais elle peut permettre à la communauté de pouvoir circonscrire son espace, prévoir et réaliser des activités de développement, prévoir et projeter des activités d’accompagnement de toute la communauté. Au-delà, pour nos activités personnelles et dans le cadre de notre association, nous pouvons accompagner d’autres personnes qui aimeraient engager des projets de développement dans leurs zones », déclare l’agroéconomiste.
Dans la même veine, la chargée de programmes à la Fondation internationale pour le développement, l’éducation, l’entrepreneuriat et la protection de l’environnement (FIDEPE), Michèle Josée Bakam, en activité dans les forêts sacrées de Bakassa et Bamendjinda entre autres, y voit « une aubaine pour aider les communautés locales à mieux sécuriser leurs droits d’accès aux ressources naturelles et aux terres et maîtriser leur espace pour projeter des activités de développement ». Jibirila Haman, Chief Executive Officer d’Environment, Conservation of Public Health (ECO-PH), se rappelle encore qu’en 2002, son organisation a réalisé une enquête qui a permis d’identifier à peu près 47 forêts sacrées. Cependant, ces données n’ont pas été géoreférencées et capitalisées parce que collectées de manière non professionnelle. « Nous serons désormais capables de cartographier les forêts sacrées pour voir dans quelle mesure appliquer les mesures de conservation prioritaires identifiées auprès des communautés, parce que nous travaillons avec elles sur de tels projets traditionnels. Nous comptons réaliser la première carte des forêts sacrées qui se trouvent dans la chefferie de Bambui », déclare avec entrain celui qui est en activité à Santa dans la région du Nord-Ouest.
Un tremplin permettant à Rainforest Alliance de réaliser ses ambitions de promouvoir une agriculture durable
Selon l’exigence 5.8.2 du standard de l’agriculture durable de Rainforest Alliance, les populations autochtones, les communautés et les autres parties prenantes doivent démontrer de leurs droits à l’utilisation des terres sur lesquelles elles pratiquent leurs activités agricoles. Elles doivent également prouver que les terres abritant leurs unités agricoles ne sont pas sujettes à des conflits. Cela doit être documenté et accepté par les différentes entités jouissant des affectations du sol, y compris les autorités locales.
De même, les membres des groupes ou détenteurs des unités agricoles doivent mettre à la disposition de l’équipe de certification un document démontrant de leur propriété foncière. Et, en l’absence des titres fonciers, la cartographie participative permet aux membres d’une coopérative donnée de justifier la propriété foncière de leurs parcelles ou unités agricoles dans une dynamique de validation participative, en présence des autorités traditionnelles, des communautés voisines et des populations locales.
« Les participants pourront cartographier les unités agricoles. A Rainforest Alliance, il est exigé. L’une des conditions c’est d’avoir le polygone sur lequel l’activité agricole est menée. Si je suis en train de développer une bananeraie ou une cacaoyère, ce qui intéresse, nous avons besoin de la superficie et du polygone. On a besoin de cette information pour analyser le risque. De façon durable, on n’aimerait pas que les plantations se retrouvent dans une aire protégée. Si votre unité agricole chevauche une zone forestière, il faut calculer le pourcentage. Si le pourcentage est élevé, ça ne favorise pas la durabilité », fait observer Rodrigue Nodem de Rainforest Alliance. Et d’ajouter : « Si vous avez une unité agricole qui est de trois hectares chevauchant la forêt de plus de demi-hectare, le rythme de déforestation est suffisamment élevé et nous allons attirer l’attention de l’organisme certificateur que votre agriculture est certes rentable, mais pas durable. C’est dans ce sens que nous recueillons les informations géo-référenciées des unités agricoles ».
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