Le thème est explicite : « L’importance de la vie associative en communauté ». Cet événement, a rassemblé des membres de la communauté, des leaders associatifs et des notables pour discuter des enjeux actuels de la vie associative et explorer des solutions pour revitaliser l’engagement communautaire.Une problématique d’autant plus cruciale que la désaffection des jeunes pour les associations communautaires devient, au fil des ans, un sujet d’inquiétude chez les aînés.
Quelques membres de l’élite Bandenkop à Yaoundé © Ngounou Boris
L’interrogation demeure : pourquoi les jeunes désertent-ils les associations ? Si, dans les registres, l’AEJEBY compte plusieurs dizaines de membres, la réalité du terrain est tout autre. La présidente de l’AEJEBY, Wafang Guembeu Géraldine, a exprimé sa satisfaction quant à la participation à la conférence, tout en soulignant les défis persistants :
« Nous sommes assez nombreux. Dans les cahiers, comme nous l’a précisé le modérateur, mais sur le terrain, comme pour cette conférence, nous pouvons nous retrouver à trois, nous pouvons nous retrouver à deux. »
Avis partagé par Kemgang Alfred, un notable de la communauté qui coordonne les activités de l’Association des Élèves, Jeunes et Étudiants Bandenkop « Notre véritable problème était qu’on avait le souci que nos enfants ne rejoignent pas d’autres enfants de la jeunesse de notre association pour essayer de bâtir quelque chose de nouveau ou bien d’être ensemble et de conserver le patrimoine que nos ancêtres nous ont laissé. », regrette-t-il.
Un aveu d’échec ? Pas vraiment. Plutôt le reflet d’un contexte social et culturel en mutation, où les jeunes, happés par la modernité et les urgences individuelles, peinent à voir l’intérêt immédiat d’un engagement communautaire.
Pour François Wague, président du Conseil de la communauté Bandenkop à Yaoundé, la solution réside dans la revalorisation du sens profond de l’engagement collectif :
« Aujourd’hui, l’école ne suffit plus à elle seule pour former la jeunesse. Il faut l’école de la vie. Et c’est par la participation à la vie associative que les jeunes s’accomplissent pleinement. »
Son discours, ferme mais bienveillant, est ponctué de rappels à l’histoire, aux valeurs culturelles, aux symboles. Un retour aux fondamentaux, jugé nécessaire pour bâtir une relève consciente de son identité. Grâce à cet intérêt « Nous pensons que nous aurons des jours meilleurs concernant l’association des jeunes et élèves Bandenkop de la section de Yaoundé. », a reconnu Géraldine Wafang Guembeu.
Les intervenants se succèdent : notables, anciens présidents, membres de clans d’âge. Tous apportent un éclairage différent. Pour certains, comme M. Dieudonné Kamgouo, ex-président de l’AEJEB nationale, il faut adapter les formats de participation, rendre les activités plus attrayantes et ancrées dans les réalités des jeunes d’aujourd’hui.
Pour d’autres, comme Jean-Marie Chekem, la clé est dans la transmission intergénérationnelle. Il cite l’exemple de son clan, le « Gwang meuh Neuh Sieh », où les jeunes sont peu à peu responsabilisés à travers des rites et projets communs.
Si les anciens appellent à l’unité, la jeunesse, elle, attend des preuves. Pour la présidente Géraldine, c’est clair : « Les jeunes sont réticents parce qu’ils ne trouvent pas un intérêt particulier. » Mais elle insiste : « Je ne suis pas une toute petite fille comme je parais. J’ai commencé l’AEJEB en 2011. Du moment qu’on est jeune – jusqu’à 77 ans même, dit le président – on peut adhérer à l’AEJEB. »
Elle plaide pour un accompagnement parental plus marqué : « Dans les maisons, on ne parle plus notre langue aux enfants. Qu’ils viennent au moins à l’AEJEB pour apprendre. Et que les parents donnent l’argent du taxi. »
La transmission des savoirs et l’enracinement culturel sont des enjeux majeurs. Kemgang Alfred, notable et encadreur de la jeunesse, le martèle :
« Nos parents nous ont laissé des associations. Si nos enfants ne prennent pas le relais, tout va se perdre. Déjà, quand on est dans l’association, on apprend à se connaître, à sauvegarder notre culture, à se marier entre nous même ! »
Son objectif ? Atteindre 50 membres actifs d’ici la fin de l’année, contre une quinzaine actuellement.
À la fin de la conférence, un sentiment partagé flotte dans la salle : une lucidité sur les obstacles, mais aussi une réelle volonté de rebondir.
« Il faudrait que dès le bas âge, élèves, jeunes et étudiants, nous puissions vraiment nous rendre dans les salles de réunion, pour qu’ensemble nous puissions bâtir notre village », résume un jeune intervenant.
Le cas de la communauté Bandenkop est symptomatique d’une crise plus large de la vie associative au Cameroun. Pourtant, cette crise peut devenir une opportunité : celle de repenser les formes d’engagement, de reconnecter les générations, et de faire des associations de véritables écoles de citoyenneté et de culture.
Yaoundé, ce 5 avril 2025, la communauté Bandenkop a peut-être planté une graine. À elle désormais d’en prendre soin.