[Vitrine du Cameroun] – Dans le cadre de la mise en œuvre de ses activités L’Ong Ajemalebu Self Help (Ajesh) a organisé un atelier de sensibilisation et d’échanges pour protéger la réserve forestière de Bapouh-Bana, le 4 septembre 2024 au foyer de Balambo dans l’arrondissement de Bangou, départements des Hauts-Plateaux, région de l’Ouest-Cameroun.
L’objectif était d’informer toutes les parties prenantes du projet (administrateurs locaux, personnels du Minfof, du Minepded, commune, chefs traditionnels, agriculteurs, éleveurs Mbororos, femmes et jeunes) sur la nécessité de protéger la réserve forestière et les plaines d’inondation.
Le projet se tient dans un contexte où, à en croire Harrison AjebeNnoko, directeur international de l’Ong Ajesh (basée au Cameroun, au Ghana, en Tanzanie et aux Etats-Unis), l’espace de la réserve forestière de Bapouh-Bana est tellement dégradé, selon l’enquête que nous avons menée en utilisant les autres outils comme GLAD mis en place par World Resources Institute (WRI). « Notre travail rentre en droite ligne avec la vision de l’Etat qui veut restaurer au moins 12 millions d’hectares de terres dégradées au Cameroun. En lien avec notre nouvelle loi forestière promulguée en juillet dernier, il répond aussi aux conventions internationales ratifiées par l’Etat, notamment celle sur la biodiversité au niveau de la cible 2 qui parle de restauration. Nous sommes là pour contribuer à soutenir les actions de l’Etat », rassure M. Harrison AjebeNnoko.
Sur le plan opérationnel, les explications fournies par le coordonnateur de la restauration à Ajesh, Dr. Juscar Ndjounguep, il est question d’établir deux pépinières à gestion communautaire qui seront constituées à 65% d’eucalyptus, à 20% d’arbres agroforestiers et 15% d’arbres forestiers. « Parmi ces arbres forestiers, il y aura une bonne partie pour la reconstitution de la nappe d’eau et d’autres pour les planches qui peuvent fournir des services écosystémiques. La mise en place de ces deux pépinières sur deux sites va mobiliser les populations du village qui vont être formés dans la mise en œuvre jusqu’au suivi dans la plantation de ces arbres autour de leurs champs et dans l’espace de la réserve forestière », précise notre source.
Les deux pépinières de 5000 plants chacun seront installées à Balambo 1 et Badjieuguen, pour la restauration d’une superficie de 25 hectares. « Ces deux pépinières vont permettre de générer des emplois inestimables dans les quatre villages autour de la réserve et de rendre les populations économiquement stables. In fine, l’impact peut être vu de manière globale et locale. De manière globale, c’est le changement du couvert forestier de la réserve forestière. Au niveau local, il y aura une reconstitution de l’écosystème, de la ressource en eau et un changement sur les techniques agricoles et les besoins socio-économiques des communautés qui vivent autour de cette réserve », martèle le Dr. Juscar Ndjounguep.
Une initiative saluée à juste titre par les pouvoirs publics
Dans son souci de trouver des solutions pour compenser les pertes en ressources naturelles, le ministère des Forêts et de la Faune salue le projet. « C’est dans ce sens que le ministre des Forêts et de la de la Faune a signé un mémorandum d’entente avec Ajesh pour la restauration des zones dégradées dans les hautes plateaux de l’Ouest. Ce projet est le bienvenu. Le Minfof à son niveau procède également au reboisement et à la restauration des zones dégradées. Et nous considérons cette initiative comme un plus à notre action qui est permanente sur toute l’étendue du territoire national », fait observer le délégué départemental Minfof pour les Hauts Plateaux, Youssoufa Maty qui est à sa première mission sur le terrain après sa récente nomination.
Même son de cloche du côté du ministère de l’Environnement, de la Protection de la nature et du Développement durable (Minepded) qui voit en le projet de restauration une aubaine. « Il s’agit d’un projet viable qui vient à point nommé parce qu’avec la restauration des terres de ce paysage, on assiste à la protection de la biodiversité. C’est un projet de survie qui va permettre aux générations futures de revivre ce que nos parents ont vécu. Aujourd’hui, nous observons déjà une dégradation assez importante », déclare le délégué départemental Minepded des Hauts Plateaux, Paul Fokwo. « Si ce projet n’était pas arrivé, on ne saurait pas à quel niveau nous serions avec les changements climatiques et autres. Le projet est venu pour juguler cette crise environnementale. Notre contribution est simple : assurer le suivi des dispositions règlementaires en vigueur, puisqu’il faut déjà au préalable réaliser une notice d’impact environnemental qui va dégager un cahier de charges, qui permettra aux uns et aux autres de respecter les dispositions liées au reboisement », poursuit notre interlocuteur.
L’Agence nationale d’appui au développement forestier (Anafor) aura son rôle à jouer dans ce processus, en termes d’accompagnement des initiatives de plantation, c’est-à-dire des pépinières qui font référence au choix des espèces à mettre en place, de l’itinéraire de production. « Dans le cadre d’un projet comme celui-ci, l’Anafor, de par son expertise technique dans la zone de savane humide, a beaucoup à apporter en termes d’encadrement. Si l’occasion nous est donnée, nous allons faciliter le processus de production et de mise en place des plantations. Il faut apporter également la semence de qualité. Il faut avoir de bonnes semences, mettre en place la pépinière qui doit respecter les canons de la production des plants, le suivi des plants jusqu’à la mise en place des plantations. Si vous ratez la pépinière, vous n’aurez pas suffisamment des plants vigoureux pour faire face à la réalité du milieu naturel », souligne Christian Sime, chef d’antenne régional de l’Anafor pour la zone de savane humide.
La consultation et la participation des communautés, facteurs de réussite du projet
En lien avec le contenu du projet : « Eliminer les obstacles à la conservation de la biodiversité, à la conservation de la biodiversité, à la restauration des terres et à la gestion des durable des forêts à travers une gestion communautaire des paysages » (COBALAM), développé depuis 2020 par Rainforest Alliance et ONU-Environnement, la particularité de l’activité d’Ajesh est d’associer les populations riveraines. Tout en convoquant la nouvelle loi sur forestière et faunique du 24 juillet 2024, le délégué départemental Minfof des Hauts-Plateaux, Youssoufa Maty, revient sur la portée d’une telle démarche. « Nous avons souvent échoué dans la mise en œuvre de certains projets parce que la base n’était pas associée. Et c’est dans ce contexte que le ministre a pris l’initiative de mettre en place l’approche « Bottom Up », pour permettre que la population soit impliquée dans la conservation et la gestion des ressources naturelles, pour le bien-être de tous », justifie-t-il.
A sa suite, la représentante du maire de Bangou, Mme Pascaline Kewe, fait savoir que l’atelier de Balambo permet aux populations riveraines du mont de s’approprier déjà le projet et de comprendre qu’elles en font partie. « Si un projet ne regroupe pas les populations riveraines et voisines au mont, tout va se passer comme si c’était une histoire de l’administration communale de Bangou avec ses voisins de Bangangté et Bana. Or, lorsque la population est invitée à un atelier pareil, chacun comprend qu’il doit s’impliquer et prendre ce projet à bras-le-corps afin qu’il n’y ait pas de dérives et que le projet puisse profiter au maximum à la commune, la population incluse », souligne le deuxième adjoint au maire.
L’implication des communautés est d’autant plus justifiée par le fait que ce sont ces communautés qui vivent l’impact du changement climatique à la base. « Ce sont encore elles qui vivent autour de cet espace. On est en train de voir la possibilité de former les communautés à mieux mettre en place les pépinières, planter les arbres et gérer les plants mis en terre. Avec les communautés, on ne va pas seulement apporter les arbres, mais voir avec elles quelles sont les espèces à planter, en collaboration avec la commune. A travers le Comité forêt-paysan qu’on va mettre en place, on va renforcer leurs capacités pour une meilleure gestion de la restauration », confie Harrison AjebeNnoko.
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